La zone : autrefois, zone militaire qui s'étendait au-delà des anciennes fortifications de Paris, où aucune construction ne devait être édifiée (zone non aedificandi) et occupée illégalement par des constructions légères et misérables ; aujourd'hui, espace, à la limite d'une ville, caractérisé par la misère de son habitat. © Larousse.
La zone de Paris a vu depuis le milieu des années 50 pousser des tours de béton là où autrefois s'étendaient des habitations faites de tôle ondulée et de vieilles planches de bois qui formaient les bidonvilles. Les habitants de ces bidonvilles qui vivaient dans des conditions déplorables du fait de leurs ressources limitées (ouvriers pour la plupart et sous-payés) purent connaître le confort d'appartements spacieux avec chauffage et eau courante. Les ensembles naquirent. On regroupa une forte concentration de population dans des immeubles collectifs dit à loyer modéré (H.L.M) au milieu de villes artificielles rebaptisées « cités » pour l'occasion. Il fallait faire face à la pénurie de logements de l'après-guerre accentuée par le redémarrage de l'économie. En quelques décennies, les blocs et les barres poussèrent comme des champignons, nos architectes s'activèrent à créer des espaces de vie agréables mais qui au final n'étaient rien d'autres qu'un amas de béton élevé sur des dizaines de mètres et espacé d'autant (la cité des 4000 à La Courneuve, le « Grand L » à Antony, ...). Pour ce faire, on fit venir de la main d'œuvre bon marché de l'étranger (Espagne, Italie, Maghreb et Afrique noire) qui étaient hébergés dans des foyers de l'époque et autres logements insalubres. Quand les premiers habitants des cités purent migrer vers des résidences et pavillons construits en périphérie des agglomérations, les places vacantes laissées dans les blocs furent données aux travailleurs immigrés qui firent venir leur famille de leur pays d'origine. Ces gens du fait de leurs origines ethniques, culturelles et religieuses diverses s'intégraient plus ou moins bien à la société française et la crise économique débutant après le premier choc pétrolier ne leur laissaient que peu de chance de pouvoir migrer, comme leurs prédécesseurs vers les résidences. Aujourd'hui, malgré tous les efforts qu'emploient les communes à instaurer un cadre de vie acceptable dans les cités, des problèmes laissés en suspens ressurgissent de manières plus ou moins spectaculaire : chômage, précarité, racisme, violence... la zone, pour beaucoup, est devenue synonyme de zone de non droit, de ghetto, de communautarisme, de jeunesse inculte et agressive, de rap et d'immigration illégale. Au travers de son langage emprunté à l'argot classique, au verlan et divers dialectes (européens, africains, antillais,…) la zone tente de s'inventer une culture. Le rap français en est une des manifestations les plus expressives. Depuis maintenant près de 20 ans, et après un départ difficile, le rap français contribue, tout en essayant de se démarquer du mouvement hip-hop américain, à entretenir le mythe de la cité-dortoir coupe-gorge, lieu de tous les vices...
Avec plus de 2700 entrées, ce dictionnaire tente, à l'aide de nombreux exemples puisés dans le répertoire rap et rock français mais aussi dans le cinéma, la pub, la télé, la radio... et le quotidien, de répertorier les mots les plus couramment usités dans nos bonnes vieilles cités de banlieue. Et comme la frontière entre ce sabir et le reste du langage populaire n’est pas clairement délimitée, ce dictionnaire intègre aussi en grande partie l’argot classique actuel, le parlé jeune, et le parlé branché. Il s'enrichit de jour en jour, n'hésitez pas à me faire part de vos réflexions, de vos connaissances lexicales et de vos exemples…
Cobra le Cynique
Auteur du Dictionnaire de la Zone